ORNI - Pierre Dubochet

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ORNI - Ordonnance sur la protection contre le rayonnement non ionisant

Les normes en vigueur (en Suisse, l'Ordonnance sur la protection contre le rayonnement non ionisant, l'ORNI) ne protègent pas des risques de l'exposition chronique aux RNI faibles. Les auteurs, pour quelque raison que nous ne connaissons pas, ont choisi d'adapter les valeurs de la future ordonnance aux valeurs mesurée dans le terrain, plutôt que de risquer de bouleverser certains secteurs économiques.

© Pierre Dubochet, ing. radio
toxicologie des RNI
10 octobre 2017
mis à jour le 21 novembre 2018
Les valeurs ORNI ont été décidées peu avant l'an 2000
Lecture : 3 min 30 | 1020 mots
Les normes en vigueur (en Suisse, l'Ordonnance sur la protection contre le rayonnement non ionisant, l'ORNI) ne protègent pas des risques de l'exposition chronique aux RNI faibles.
Les valeurs ORNI ont été décidées peu avant l'an 2000, alors que nombre d'infrastructures étaient fonctionnelles. Les auteurs, pour quelque raison que nous ne connaissons pas, ont choisi d'adapter les valeurs de la future ordonnance aux valeurs mesurée dans le terrain, plutôt que de risquer de bouleverser certains secteurs économiques.
Des limites élevées allaient entraîner des risques sanitaires. Des limites qui auraient protégé le public allaient déclencher de multiples litiges en justice et donc entraver le fonctionnement de l'économie.
À peu de choses près, les auteurs ont rendu conformes les valeurs de la future Ordonnance aux valeurs mesurées sur le terrain.
Les décideurs ont choisi de retenir des valeurs élevées. Très élevées. Les personnes qui appliquent l'ORNI ont choisi de nier le danger.
Si bien qu'en toutes circonstances, par exemple quand le plus gros opérateur de téléphonie mobile du pays reconnaît que l'électrosmog entraîne des «dommages clairs du matériel héréditaire» et qu'il y a «des indications d’un risque accru de cancer», il peut continuer à faire du commerce en répondant: «nos équipements sont conformes à toutes les exigences légales.»
L'OMS évoquait les dangers des rayonnements faibles en 1973, en 1981, un peu moins en 1985 avant de se soumettre à l'industrie comme le révèle son ouvrage de 1991.
              Les valeurs limites en Suisse en haute fréquence: une histoire de singes
              Comment les normes de protection ont-elles été établies ?
              L’ICNIRP —une société commerciale en Allemagne habilement présentée comme une organisation non gouvernementale— s'est basée sur l’altération du comportement de primates (non humains) soumis à l’exposition de rayonnements pour rédiger ses Recommandations.
              Document : les conflits d'intérêts à l'ICNIRP (ouvre une nouvelle fenêtre)
              Les chercheurs chronométraient le temps que mettaient les primates pour trouver des boulettes de nourriture placées dans des labyrinthes. L'expérience était répétée en soumettant les primates à un rayonnement.
              Dans les années 1970 et au début des années 1980, des chercheurs ont établi un seuil de perturbation de leur performance comportementale à près de 4 W/kg.
              Vingt ans plus tard, un sous-multiple de cette valeur a été utilisé comme une exposition maximale admissible pour les Recommandations de l'ICNIRP en 1998, dont les auteurs de l'ORNI suisse se sont inspirés.
              Première conséquence directe de cette Recommandation issue de observation comportementale de quelques singes: la limite légale d'exposition de votre smartphone est de 2 W/kg.
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                          89 % des téléphones hors normes
                          Apprenez que 89 % des téléphones testés en conditions réelles en 2015 dépassent le DAS de 2 W/kg. Un quart d’entre eux dépasse 4 W/kg. Quelques modèles atteignent 7 W/kg en condition d'utilisation normale. C'est ce que révèle le phonegate.
                          En juin 2018 en Suisse, un an après la révélation que la plupart des smartphones dépassent les limites de rayonnement autorisées lorsque la mesure correspond au port du téléphone près du corps, pas grand-chose n'a changé à ma connaissance.
                          Deuxième conséquence de cette Recommandation basée sur le comportement de singes: les opérateurs sont autorisés à placer des émetteurs à microondes d'une puissance de 6'000 W (l'équivalent de l'émission maximale en 3G de 48'000 smartphones) et plus sur le toit d'immeubles par exemple, qui perturbent l'environnement de manière extrême à des centaines de mètres de distance, cela 24 heures sur 24 et 365 jours par an.
                          Les opérateurs n'ont aucun scrupule à installer ce gens d'équipements à quelques dizaines de mètres d'écoles et de crèches, alors qu'ils ont conscience que les émissions peuvent causer des «dommages clairs du matériel héréditaire.»
                          Sur des sites sportifs par exemple, la puissance émise approche parfois 50'000 W (l'équivalent de 400'000 smartphones en émission 3G à la puissance maxi).
                                      Lignes de traction CFF: le risque de l'exposition chronique
                                      Autre exemple qui montre que les normes ORNI sont trop permissives : les lignes de traction CFF. Ci-dessous, ma mesure effectuée à douze mètres à l'horizontale du câble électrique le plus proche. Il s'agit d'une ligne à deux voies. Difficile d'habiter plus près, vous en conviendrez.
                                      Le diagramme correspond à un temps de six minutes durant lequel deux trains de voyageurs sont passés. Difficile d'avoir plus de passage, et donc de mesurer un champ magnétique beaucoup plus élevé, n'est-ce pas? Que voyons-nous:


                                      Fig. 1. Mesure de rayonnement à 12 mètres d'une double ligne CFF
                                      Le champ magnétique minimum est de 33 nanoteslas (nT), au maximum 2'107 nT et en moyenne 919 nT. Que dit l'ORNI (art. 54)? « La valeur limite de l'installation est de 1'000 nT pour la valeur efficace de la densité de flux magnétique moyennée sur 24 h.»
                                      Sur cette ligne, si les trains se suivaient à une cadence soutenue, l'ORNI serait quand même respectée. Je me demande s'il existe un endroit où l'ORNI pourrait être dépassable.
                                      Selon les directives de l'EUROPAEM pour l'exposition de jour ou de nuit, la moyenne arithmétique de 100 nT correspond au segment jaune en bas.
                                      L'exposition de la population sensible devrait se situer dans la moyenne arithmétique de 30 nT, mise en évidence par le segment vert à peine visible ici, au bas du graphique.
                                                  Une protection... pour autant que cela soit économiquement supportable
                                                  Le point de vue des autorités sur les rayonnements non ionisants est le suivant. «Du point de vue de la prévention, les atteintes doivent rester, par principe, aussi basses que le permettent l’état de la technique et les conditions d’exploitation, et pour autant que cela soit économiquement supportable».
                                                  Toute la question est : qu'est-ce qui est économiquement supportable? Les décisions de l'ORNI ne sont pas prises exclusivement avec une vision scientifique, mais en incluant une notion de ce qui doit être économiquement supportable pour l'exploitant.
                                                  Une véritable réflexion sur ce qui devrait être économiquement supportable devrait mettre dans la balance, non seulement une hausse de coûts pour l'exploitant, mais également les coûts sanitaires provoqués par l'exposition aux rayonnements non ionisants.
                                                              Ces publications complèteront utilement votre savoir :
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