facteur de correction le Tribunal fédéral a tranché - Pierre Dubochet

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L'opérateur le plus puissant de Suisse, Swisscom, a épuisé tous ses droits de recours. Et a perdu.

L'exploitation des antennes adaptatives à formation de faisceau doit faire l'objet d'une mise à l'enquête en bonne et due forme.
© Pierre Dubochet, ing. radio
toxicologie des RNI
conflit d'intérêts : aucun avec cet article
15 mai 2024 (alors dans les brèves)
«Autorisation d’exploitation de trois émetteurs retirée»
Lecture : 3 min | 910 mots
L'opérateur le plus puissant de Suisse, Swisscom, a épuisé tous ses droits de recours. Et a perdu. Swisscom exploite trois stations de base de téléphonie mobile dans la commune politique de Wil. Elles sont équipées d’antennes adaptatives à formation faisceau en 2019, sans fonctionnement avec un facteur de correction. Les 2 et 3 juin 2021, Swisscom a soumis de nouvelles fiches de données spécifiques au site avec mention de «Mise à jour selon l’addenda de l’OFEV sur les antennes adaptatives du 23 février 2021» à l’autorité communale de Wil pour deux de ses systèmes de communication mobile, «A» et «B», en introduisant le facteur de correction. Swisscom a fait de même avec sa station «C» le 5 juillet 2022.
Le facteur de correction permet aux antennes adaptatives à formation de faisceau d’émettre avec une puissance multipliée —jusqu’à dix fois selon le modèle— par rapport à la puissance indiquée dans la fiche de données spécifiques au site qui définit les caractéristiques de l’installation projetée, sous réserve que le temps d’émission soit limité, dans des périodes de 6 minutes.
Le 18 juillet 2022, la commune politique de Wil a retiré l’autorisation d’exploitation des trois installations de téléphonie mobile qui s’écartaient du permis de construire délivré selon la dernière fiche de données spécifiques au site active.
La constructrice a fait recours le 25 juillet 2022 auprès du Département de la construction et de l’environnement du canton de Saint-Gall. Celui-ci a réuni les trois procédures en une, a retiré l’effet suspensif et a rejeté les recours le 10 janvier 2023.
La constructrice a fait recours devant le tribunal administratif du canton de Saint-Gall. Le 17 août 2023, le tribunal administratif a modifié le ch. 1b du dispositif de la décision sur recours concernant une des trois installations, en ce sens qu’il ne fallait pas entrer en matière sur la demande. Le tribunal a admis l’obligation d’obtenir un permis de construire sur la base de l’art. 136 al. 1 et 2 de la loi cantonale sur l’aménagement du territoire et les constructions du 5 juillet 2016 (PBG/SG ; sGS 731.1). Le recours de l’opérateur a été rejeté.

La commune politique de Wil a retiré l’autorisation d’exploitation des trois installations de téléphonie mobile qui s’écartaient du permis de construire délivré selon la dernière fiche de données spécifiques au site active.

Swisscom fait recours au Tribunal fédéral
Le 20 septembre 2023, Swisscom a déposé un recours en matière de droit public au Tribunal fédéral contre cette décision. Dans sa réponse à la consultation, l’Office fédéral de l’environnement (OFEV) explique que l’application d’un facteur de correction aux antennes adaptatives existantes n’entraîne globalement pas d’augmentation de l’exposition au rayonnement dans l’environnement de l’installation et n’est pas considérée comme une modification de l’installation selon l’ordonnance du 23 décembre 1999 sur la protection contre le rayonnement non ionisant (ORNI ; RS 814.710). La question de savoir si une procédure d’autorisation de construire est malgré tout nécessaire s’apprécie au regard de l’art. 22, al. 1, LAT (RS 700) et de la concrétisation respective des cantons, qui peuvent définir plus largement l’obligation d’autorisation.
L’installation des antennes adaptatives à formation de faisceau se déroule généralement dans le cadre d’une procédure dite «bagatelle», sans possibilité d’opposition de la part des riverains. La mise en œuvre d’une procédure ordinaire d’autorisation de construire semble s’imposer afin de garantir le droit d’être entendu et la protection juridique des personnes concernées de manière raisonnablement exigible (art. 29 et 29a Cst.), note le Tribunal fédéral. Les personnes concernées peuvent exiger un contrôle des immissions par les autorités, même sans procédure d’autorisation de construire. Ceci présuppose toutefois que les personnes concernées aient connaissance des immissions ou de leur modification. Ceci n’est pas garanti sans publication d’une demande de permis de construire.
Par ailleurs, relève le tribunal fédéral, il y aurait une grande insécurité juridique s’il fallait s’attendre à tout moment à une plainte pour immissions de la part du voisinage. Dans cette mesure, il semble également plus avantageux du point de vue des opérateurs de téléphonie mobile de regrouper toutes les oppositions potentielles à l’application du facteur de correction dans une procédure d’autorisation de construire. Dans les explications relatives à la modification de l’ordonnance du 17 décembre 2021, il a d’ailleurs été expressément indiqué qu’il appartenait aux cantons de décider de la procédure à suivre pour appliquer l’aide à l’exécution (p. 3). Le fait que la transformation ne constitue pas une modification de l’installation au sens de l’ORNI ne permet pas de conclure qu’une autorisation de construire n’est pas requise.
Le recours de Swisscom est rejeté le 23 avril 2024. Le Tribunal fédéral maintient l’interdiction prononcée par la commune de Wil d’exploiter une installation de téléphonie mobile dont les caractéristiques techniques s’écartent de la fiche de données spécifiques au site active. L’opérateur supporte les frais et ne reçoit aucune indemnité de partie.
Enfin! Le Tribunal fédéral a tranché un objet de litige avec l’installation des émetteurs 5G depuis 2019. Cette fois c’est clair: un opérateur de téléphonie mobile n’est pas autorisé à introduire un facteur de correction à ses stations de base techniquement équipées pour ce faire sans procéder à une mise à l’enquête.

Les personnes concernées par le rayonnement doivent savoir qu’il y a modification des immissions. Ceci n’est pas garanti sans publication d’une demande de permis de construire.

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